Arrivé à Singapour pour une escale de 4h je peux enfin profiter d’un peu de tranquillité car tout s’était enchaîné sans aucun répit à Istanbul. Cette 2ème étape, fut longue, très longue, 10h dans peu d’espace, coincé contre le hublot du gros porteur. Singapour est un énorme aéroport avec 4 terminaux dont chacun à la taille d’Orly, reliés entre eux par des trains ou des bus. C’est une fourmilière humaine incroyable, mais super bien organisée. Dernier avion pour Phnom Penh dans 3h30. Tout est parfait, rien perdu, même pas mon rhume, ma toux et mon passeport, récupéré en retournant dans le salon où il gisait sur le sol. Arrivée à Phnom Penh 2h plus tard, par un beau soleil, ici c’est l’été. Transit en Tuc-Tuc local de l’aéroport pour le quartier du « river side » du Mékong, près du Palais Impérial. Je connais cette ville pour l’avoir visitée il y a 11ans en 2013, avec Virginie, ma fille et si je note quelques changements, je me repère assez vite. De jour le quartier est tranquille avec une activité déambulatoire paisible des vendeurs à vélo ou en Tuc-Tuc. La nuit c’est autre chose : les néons clignent de l’œil de tous côtés et les passants se font héler par de nombreux groupes de jeunes femmes, jeunes, très jeunes. Ici la prostitution s’affiche comme une activité économique quasi normale. A l’hôtel je rencontre Jean Bernard, un français de la Réunion, natif de Madagascar. JB a roulé sa bosse en Asie. Très sympathique, il a la flegme attitude des réunionnais « qui ne se prennent pas la tête » et le côté cartésien des agents du Trésor Public, dont il était cadre : « la synthèse s’il te plaît ! ». Nous échangerons quelque souvenirs de nos périples avant de nous séparer, lui pour Sihanouk ville et les îles du golf de Thaïlande, moi pour Cho Doc à la frontière du Vietnam par bateau sur le Mékong. Cette fois ça commence à respirer vraiment le voyage !
Le Mékong, le porteur de vie
C’est face au fleuve, à l’embarquement, que je reçois un SMS d’Anna qui me fait part à cet instant « D’une pensée pour Pierre-Joël » L’émotion nous saisit alors en même temps à des milliers de kilomètres. Avec ce fleuve où les cendres de notre ami dérivent au gré des flots, s’écoule le souvenir de sa vie. Ce fleuve, qu’il a aimé, est un fabuleux porteur de vie. Sa puissance tranquille, sa magnificence sobre, réunissent toutes les populations sur son parcours, transportent ou organisent la vie des hommes de toutes conditions depuis la nuit des temps. Sur lui défilent en folles parades les barges chargées de divers frets. Sous lui, des dragueuses de sable, comme des girafes de fer aux longs cous, remplissent inlassablement leur nasses. Partout l’activité humaine dérobe aux berges du fleuve des mètres carrés à l’aide de gigantesques mikado de pieux où sont implantées maisons, docks de déchargement et autres activités économiques. Le contrôle des passeports et des visas à lieu lors de deux appontages à des postes frontaliers exotiques implantés sur les berges du Mékong en amont de Cho Doc. Une heure plus tard, après une navigation sur l’ultime radicelle d’eau du Mékong, c’est l’arrivée de nuit à Cho Doc, première ville Vietnamienne d’environ 100000 habitants. Le contact est brutal. Je suis accueilli par un tintamarre de sons en provenance du trafic anarchique et un feu d’artifice de néons multicolores dont toutes les boutiques s’affichent. Je trouve néanmoins sans difficulté à me loger pour la nuit. Les Vietnamiens sont très accueillants et vont me le démontrer à de nombreuses occasions. Demain départ en vélo pour le delta du Mékong puis Ho Chi Minh ville, Mais c’est une autre histoire…